mercredi 21 mai 2008

Dak’art 2008


Dak’art 2008
Salon du design : Utile et agréable, l’union sacrée

Jusqu’au 09 juin prochain, 13 designers exposent leurs œuvres à la galerie Le Manège pour le Salon du design de la huitième Biennale de l’art africain contemporain, Dak’art 2008.

Une chaise ou une table, un fauteuil ou une lampe, autant d’objets qui, dans nos vies d’intérieurs, se substituent au décor. L’on s’habitue et s’indiffère tandis qu’ils demeurent prisonniers de leur fonction et s’enlisent dans leur dimension utilitaire. Mais par la magie du design, l’œil relativise et se les approprie autrement. Pour cette expérience, le Salon du design du Dak’art fait office de laboratoire. Comme une constante, le mobilier s’impose et sert de cadre d’expression à l’essentiel des créateurs. A leur guise, la fantaisie se déploie sans dénaturer l’objet. Quand il sait correspondre à ce qu’il est, il ne sombre pas pour autant dans un conformisme aveugle, on se laisse aller. Difficile par exemple d’imaginer une table autrement que sur du bois, mais le Malien Cheikh Diallo a voulu échapper à l’enfermement du matériau habituel. Sa table à lui n’est ni plus ni moins qu’un assemblage de pièces électroniques qu’il nomme table carte mère : les mêmes dimensions, la même forme, l’usage aussi dans un vêtement tout à fait surprenant. Le banc éventail de Kossi Assou du Togo est tout aussi captivant. Au premier regard, l’on observe et s’interroge un peu sans pouvoir mettre de nom sur cette forme étrange qui ne correspond pas au registre de nos représentations imaginaires, si folles soient-elles. C’est que l’artiste a voulu jouer et sur l’espace et sur le nombre. Avec ses trois bandes quasi parallèles, il présente un certain intérêt avec l’avantage de pouvoir accueillir un certain nombre de personnes, sans les inconvénients de l’encombrement quand il s’agit de le ranger. Comme un éventail, les planches se glissent chacune à la suite de l’autre, dans un mouvement à l’horizontale.

Avec l’Ivoirien Jean Servais Somian, la ligne est nettement plus enrobée, plus accompagnée aussi. Tout en souplesse, le coffre baptisé Elle, par exemple, est un savoureux mélange de séduction et de mystère. Au toucher, la main joue avec l’ondulé de ses formes tandis que son contenu se dérobe aux regards indiscrets et excite la curiosité. En Côte d’Ivoire toujours, la créativité d’un Vincent Niamien se révèle dans l’utilisation étonnante et contrastée qu’il fait des différents matériaux : un banc en pierre et en bois, un tabouret métallique, ou un tabouret en bois et en métal.

Sur son tabouret tbeq, d’inspiration traditionnelle sans doute, Khadija Kabbaj du Maroc s’applique à son art. Plusieurs cercles concentriques se forment les uns à la suite des autres, avec un souci du détail et de la symétrie. L’on retrouve, en Tunisie cette fois, Mémia Taktak qui bouleverse le concept et l’objet avec son tapis de bois confectionné sur le modèle d’un damier. Au Sénégal, Joëlle Le Bussy Fall a choisi de vêtir l’objet d’un certain style au-delà de sa fonction première, avec sa ‘table baoulé’. Son compatriote Ousmane Mbaye s’est lui laissé tenter par un ‘bureau’ de verre. Sous son voile transparent, une impression de fraîcheur et de légèreté, de vide aussi sans rien entre l’œil et ce qui se donne à lui, sinon le silence d’un espace infini.

A sa manière, le créateur sénégalais sert de lien avec d’autres formes d’expression, dans la mesure où il se distingue aussi dans l’univers des luminaires. Avec ses boules de lumière, son ‘lustre soleil’ enivre le regard qui succombe alors à un vertige imaginaire. A ses côtés, Christian Domagni du Cameroun allie le bois au métal pour sa lampe halogène. Avec l’Algérienne Sarah Boudiaf, l’esprit oscille entre nature et artifice. Dans sa flower light ou lampe en forme de fleur, il retrouve un peu de cette nature offerte au soleil dans ces pétales qui tendent leurs mains au jour qui se lève.

Pour quelques autres créateurs, l’on a voulu choisir des voies uniques qui ont ceci de commun qu’elles se prêtent au jeu mondain. Avec ses porte-bouteilles, Kossy Traoré du Burkina Faso a voulu proposer un accessoire aussi utile que plein de finesse : il épouse parfaitement la morphologie de la bouteille et se laisse délicatement saisir. Accessoiriste aussi, la Malgache Annie Prebay Ranarivelo et ses bijoux à l’exquise saveur océane. De l’or entre les mains, il lui suffit parfois d’un rien pour faire tout un monde : colliers de perles et écailles, pierres et coraux. L’on emporte avec soi un brin de mer et l’esprit s’abandonne à la douce caresse du vent.

Théodora SY

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